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Blog politico-juridique

Lettre ouverte du FDRC a M. Ouattara, Chef d'etat ivoirien a l'occasion de la 53e fete d'independance.

Publié le 7 Août 2013 par Nick de Bessou

Lettre ouverte du FDRC à M. Ouattara, Chef d’état ivoirien

à l’occasion de la 53e fête d’indépendance.

C’est avec beaucoup de réserves et prudence mêlées à la sagesse et notre devoir de citoyens ivoiriens épris de paix et de justice que nous vous adressons cette lettre ouverte afin que l’on puisse commenter ensemble l’actualité du moment.

En effet, depuis le 5 août 2013, votre ministre de la Justice et des droits de l’homme, M. Bruno Koné annonçait la libération provisoire de 14 prisonniers politiques détenus depuis plus de deux ans. Depuis le 6 août 2013, cette décision fut exécutée à la lettre à la grande satisfaction des militants et leaders de l’opposition mais aussi des populations. Ce geste fut diversement interprété et récupéré à dessein. Là n’est pas l’importance du sujet. Le plus important est que vous veniez de poser un acte fort à l’endroit de la décrispation de l’atmosphère politique, à l’apaisement et une lucarne pour la démocratie. Nous vous en sommes reconnaissants d’avoir permis à des pères de famille, coupés du reste du monde, de regagner leurs familles biologique et politique. Cependant, votre geste est resté un peu plus inachevé.

Les personnalités libérées le sont de façon provisoire. En d’autres termes, ils sont toujours soumis à des poursuites judiciaires dans les semaines ou mois à venir. Le dossier ou les chefs d’accusation pesant contre eux existent toujours et n’ont jamais fait l’objet d’une annulation pure et simple soit pour manque de preuves contre eux ou soit pour faire baisser la tension politique déjà insoutenable. C’est un peu cela le gout ou travail inachevé de votre décision politique. Aussi, des centaines de prisonniers politiques et militaires croupissent encore dans les prisons du pays. A cela, il faut ajouter le non-retour des exilés ivoiriens.

Votre décision politique est à saluer. Cependant, elle manque gravement de suivi et de mesures d’accompagnement afin de réhabiliter les personnes libérées. Ces personnes ont malheureusement tout perdu dans cette guerre inouïe. Leurs logements et résidences sont toujours illégalement occupés. Leurs comptes bancaires sont toujours gelés. Il faut y penser sérieusement si l’intention de leur liberté même provisoire fut de baisser la tension politique. Il faut leur restituer leurs biens matériels et immobiliers afin qu’ils jouissent de leur indépendance.

Le FDRC se réjouit de la tournure actuelle des évènements. Nous avions toujours souhaité que vous mettiez un terme à la haine, la vengeance et l’état de ni guerre ni paix. De par votre geste, vous embrassez la politique des débats contradictoires. Un parti gagne les élections grâce à sa verve, son programme de gouvernement et son génie intellectuel à séduire l’électorat. Ce parti est toujours prêt à s’engager dans des débats contradictoires afin de véhiculer son idéologie mais et surtout de proposer une plus-value aux populations.

La compétition entre partis politiques doit être saine et bon enfant. La politique est un jeu, un art de ridiculiser le programme de son adversaire et se présenter comme le parti le plus indiqué. L’on cherche toujours à séduire l’électorat, car dans les faits, il est l’employeur, le décideur et il est souverain. La politique ne rime pas avec la guerre ou les armes. Les armes sont faites pour les faibles afin de se faire remarquer, entendre et s’imposer dans la société. Par contre, l’arme la plus forte, c’est l’intellect.

L’intellect peut désarmer des cœurs pleins de haine, des armées, des populations déchainées. Le cas le plus révélateur est la situation actuelle du pays. Votre parti a régné par la violence et les armes. Cependant, cela n’a pas fait monter votre popularité. Plus les populations étaient martyrisées, plus elles se tournaient vers l’opposition. Si vous faites un sondage de votre popularité, vous vous rendriez compte que même vos partisans les plus farouches vous ont tourné le dos. Ils n’osent pas s’afficher de peur qu’ils ne soient lynchés ou taxés de traitres ou de collaborateurs ou de pro-Gbagbo, ce qui est considéré comme une haute trahison dans votre camp. Nous avons nuitamment été approchés par ces personnes-là, qui dans le fond vous admirent mais ne vous reconnaissent plus. Loin de partager leur opinion sur votre personne et la gestion de l’état, nous leur avions rappelé que vous devriez vous débarrasser de vos habits de rebelle et vous comporter comme un véritable Chef d’état, un Chef d’état pour toute la nation ivoirienne et non pour un groupe ethnique ou religieux. Aussi, nous leur avions conseillé de vous séparer des faucons de votre entourage tels MM. Joël N’Guessan et Amadou Soumahoro qui tiennent des discours haineux, guerriers et séditieux. Ces personnes ne vous servent pas du tout mais plutôt ils imposent leur vision guerrière et revancharde pour les soit disant torts dont vos militants seraient victimes. Votre rôle de Chef d’état est d’être un modéré, un modérateur, un réconciliateur, un rassembleur et non l’opposé. L’article 34 de la Constitution de juillet 2000 dont vous êtes le garant stipule ceci :

« Le Président de la République est le Chef de l’état. Il incarne l’unité nationale. Il veille au respect de la Constitution. Il assure la continuité de l’état. Il est le garant de l’indépendance nationale, de l’intégrité du territoire, du respect des engagements internationaux ».

Il est de votre devoir de rassembler les populations, les unir et les réconcilier au besoin. Il est de votre devoir de demander le pardon des populations pour vos choix pour la rébellion et la guerre de mars/avril 2011 et pour une quelconque responsabilité du FPI dans la crise. Il n’est pas du devoir du Chef d’état d’exiger le pardon du FPI ou des populations. Le Chef d’état est le seul responsable ici, car il est celui-là même qui dirige la destinée du pays. Il est de son devoir d’apaiser les populations et de prendre sur lui toutes les responsabilités directes ou indirectes, partagées ou pas. Dans une entreprise, le Chef d’entreprise prend la responsabilité des actes et actions posés par ses subalternes. Quand l’entreprise ne fonctionne pas, l’on ne voit pas les employés mais plutôt la tête. C’est pour cette raison que certains ministres et chefs d’entreprises démissionnent de leur poste pour les actions posées en leur nom ou à leur insu par leurs subalternes. Par conséquent, vous n’avez pas à exiger le pardon du FPI mais plutôt les dédouaner en demandant le pardon des populations en leur nom en tant que Chef d’état. C’est ainsi que les choses fonctionnent dans les états sérieux et souverains.

Vous avez la lourde tâche de mener à bon port le bateau ivoire. Nous avons dépassé le cap de la guerre et surtout qui a gagné les élections de 2010. Vous et nous, ainsi que les populations, nous savons tous qui est le véritable vainqueur. Là n’est plus le sujet. Vous êtes désormais à la tête du pays et nous devons vous accepter comme tel. Cependant, vous ne pouvez pas échapper aux critiques des uns et des autres. Vous ne pouvez pas non plus échapper à votre part de responsabilités dans la crise ou l’imputer entièrement aux autres. Vous devez être très courageux et humble de reconnaitre votre part de responsabilités, vos erreurs de jugements et chercher à vous faire pardonner. Quel héritage ou souvenir souhaiteriez-vous laisser après votre passage à la tête de l’état ivoirien ? Un dictateur ? Un génocidaire ? Un incompétent ? Ou un travailleur, un démocrate, un légaliste, un bâtisseur, un rassembleur, l’homme qui sauva l’économie du pays ? Le choix est le vôtre. Faites le bon choix.

Vous êtes arrivé à la politique soit par accident ou soit par ambition malgré votre bagage intellectuel ou vos qualités de technicien, homme des finances. Votre reconversion à la politique fut très brève et manquait gravement de fondation ou culture politique. Cette carence politique vous a conduit à poser des actes irrationnels, séditieux, guerriers, déstabilisateurs et sécessionnistes. Votre choix pour la rébellion et plus tard pour la guerre en lieu et place du recomptage des voix, est à mettre à votre manque d’expérience politique. Vous n’avez jamais milité en tant que jeune étudiant dans une association politique ou un syndicat quelconque. Vous étiez très occupé à servir en votre qualité d’expert au FMI et à la BCEAO. Vous avez en l’espace d’une dizaine d’années brulé toutes les étapes de formation politique pour arriver au pouvoir, pouvoir qui fut possible grâce à une guerre fratricide faisant des milliers de victimes de part et d’autre. Votre adversaire et prédécesseur par contre, a pris le temps de s’imprégner dans la culture politique, de découvrir les rouages de la politique, du pouvoir, de connaitre le pays de fond en comble, de connaitre les populations et leurs besoins, de lutter contre le parti unique, d’imposer la démocratie, d’attendre patiemment son tour pour accéder au pouvoir, et ce avec la volonté expresse des populations. Cela lui a pris 30 ans de sa vie au service des autres. C’est pour cette raison que les populations sont foncièrement attachées à lui et à son parti politique. Sa popularité n’a rien à voir avec son ethnie mais plutôt pour son combat désintéressé pour le bien-être de nos populations et au-delà de nos états. L’humilité en politique aurait souhaité que vous reconnaissiez son courage et son engagement et surtout son dynamisme afin de lui ressembler ou mieux faire plus que lui. Le Président Gbagbo disait tantôt quand un homme marche, il doit laisser des traces. Avez-vous fait pareil ? Soutenez-vous cette assertion ?

Les sociétés humaines sont régies par des lois naturelles telles la division du travail. Nous ne sommes pas tous appelés à être des politiciens. Si cela était le cas, notre société s’effondrerait. Il faut bien que les médecins, les enseignants, les policiers, les banquiers, les commerçants, les religieux et bien d’autres puissent exister afin que la société se porte à merveille. Cependant, l’on peut être médecin et vouloir se reconvertir à la politique. Pour cela, il devra apprendre tout de la politique si son intention est d’être un bon politicien un jour. Cet apprentissage tout comme la médecine ou la profession d’économiste prend du temps pour la formation. On ne devient pas médecin ou économiste du jour au lendemain. C’est cela votre carence.

Votre reconversion à la politique fut très brusque et très accélérée. Vous aviez gravement raté la fondation de votre formation politique et vos militants en souffrent énormément. Votre parti, transfuge du PDCI-RDA, autrefois un parti d’intellectuels et républicains est devenu sous peu un parti tribal, clanique, violent, déstabilisateur et adepte des coups tordus. Allez-vous blâmer vos militants ou prendre sur vous la responsabilité ? Allez-vous exiger le pardon de vos militants pour avoir défiguré votre parti ou encore allez-vous prendre les pots cassés en tant que premier responsable ? Ce cas est similaire à la situation du pays où vous exigez le pardon du FPI.

Pour finir, nous souhaiterions attirer votre attention à l’occasion de la 53e fête d’indépendance. Sommes-nous réellement indépendants ? Quelle est votre définition de l’indépendance ?

Pour l’instant, vous avez fait la part belle à l’état français, l’ancienne métropole. Tout ou presque tout le patrimoine ivoirien fut bradé à la France. Notre économie est entièrement tenue par la France à hauteur de 70%. 50 ans après la déclaration des indépendances, vous trouvez normal et acceptable que nos troupes aillent défiler sur les champs Elysées à l’occasion du 14 juillet, fête d’indépendance de la France. 50 and après les indépendances, vous trouvez acceptable ou rationnel que nos prisons regorgent de prisonniers politiques, que l’état de droit n’existe plus, que les acquis démocratiques aient disparu, que la souveraineté de notre pays soit bafouée, que la nationalité soit bradée, que les ivoiriens soient victimes d’abus et de violations graves de leurs droits constitutionnels, que des ivoiriens soient en exil en violation flagrante de l’article 12 de la constitution de juillet 2000 dont vous êtes l’unique garant etc. Quelle lecture faites-vous de tout ceci ?

Vos militants qui nous approchent constamment soutiennent que vous êtes un homme bon, généreux, un démocrate, un visionnaire etc. Nous ne demandons qu’à voir dans les faits toutes ces qualités qu’on vous attribue. Ensuite nous aviserons. Pour l’instant, les choses vont de mal en pis. Telle est la triste réalité du terrain. Très bientôt, vous aurez certainement l’occasion ou l’opportunité d’en discuter avec l’opposition afin de trouver des solutions idoines pour le bien-être de nos populations. Comme nous le disions tantôt, le choix est le vôtre. Vous déciderez de l’héritage ou du souvenir que vous comptez laisser après votre passage à la tête du pays. Nous vous exhortons à lire et faire votre les propos d’un des vôtres, le Ministre Sidiki Konaté :

« Avis sur la « libération provisoire » des prisonniers LMP.

Le mois de Ramadan est le mois de Pardon et de RÉCONCILIATION. L’homme se réconcilie avec lui- même et avec son entourage. Et se réconcilie enfin avec Allah.

Je trouve TRES BIEN la libération provisoire des prisonniers. C’est un acte de Réconciliation et de Paix. Allah aime ceux qui osent construire la paix. Même si souvent ils sont incompris au départ. Je souhaite que le gouvernement aille le plus loin possible en libérant la totalité des prisonniers provisoirement. Tout en continuant d’instruire les dossiers au niveau de tous les acteurs, afin que la vérité soit Connue pour l’histoire. Ceci devra permettre au président élu S.E Alassane Ouattara, garant de la réconciliation, d’apprécier par lui-même la décision finale à prendre.

L’expérience de certains pays confrontés à pire que nous (heureusement) montre que c’est possible de vivre une telle crise et la surmonter. Avec la bonne volonté, Dieu nous y aidera. Il y a un temps pour tout. Il faut bien qu’on assume cette part de notre histoire commune. Dans l’humilité et le repentir. Et c’est valable pour chaque acteur. Dieu aime le repentir et les peuples humbles.

Le temps est l’autre nom de DIEU. Le temps nous guérira si nous prenons l’option courageuse de nous réconcilier, même sur nos divergences de départ. Ensemble, chacun à son niveau, en toute humilité et en toute responsabilité, soutenons cet élan. Car ici, il s’agit de notre présent et de notre futur. Donc de l’avenir de nos enfants et petits-enfants.

Ces enfants ont déjà nos dettes économiques à payer. Ne leurs léguons pas ce lourd fardeau. Si on s’engage sincèrement chacun dans cet élan, sans peur d’être attaqué par des faucons, Dieu nous aidera à consolider le mécanisme déjà en place (CDVR) pour traiter la question de la culpabilité et de la gestion de toutes les victimes.

Nous sommes condamnés à regarder et à dépasser les recoins noirs de notre passé collectif lointain et récent. L’Allemagne et la France d’hier et d’aujourd’hui doivent nous inspirer. Il nous faut beaucoup d’humilité, de courage politique pour soutenir cette option. Mais elle sera bonne pour nous; elle sera bonne surtout pour nos enfants et petits-enfants, futurs héritiers du pays, par la Grâce de Dieu. Dans 70 ans il n’y aura plus de ADO, GBAGBO, BEDIE, SORO, KONATE, BLÉ GOUDÉ ou autres, mais il y aura la Côte-D’ivoire. Inch Allah. Prions que les habitants de 2083 n’aient pas à gérer le lourd héritage de nos actes manqués ».

Le Forum pour la Démocratie et la Résolution des Crises (FDRC) :

  • Vous interpelle à annuler toutes les poursuites judiciaires contre les personnes jouissant de la liberté provisoire dans un souci d’apaisement, de pardon et de réconciliation.
  • Vous interpelle de libérer dans les plus brefs délais tous les prisonniers politiques et militaires en attente d’un procès ou déjà jugés et qui purgent une certaine peine.
  • Vous interpelle à annuler purement et simplement les procédures judiciaires en cours contre l’ex-Première Dame Simonne Ehivet Gbagbo afin de contenter sa famille biologique et politique, les populations et faciliter la réconciliation.
  • Vous interpelle à libérer dans les plus brefs délais le Ministre Charles Blé Goudé afin qu’il puisse prendre part à la tête de son mouvement politique le Cojep, à la décrispation du climat politique et à la réconciliation.
  • Vous conseille de sommer l’Assemblée Nationale afin que les députés puissent tabler sur les projets de loi aux fins de la réconciliation, le retour des exilés, la réhabilitation et dédommagement des anciens ministres du gouvernement précédent et leurs résidences, le dégel de leurs comptes bancaires et la restitution dans la mesure du possible des résidences et véhicules des leaders politiques et militants LMP.
  • Vous conseille de dissoudre le PNCS qui dans les faits n’inspire pas du tout confiance. Confier la gestion de la réconciliation à la société civile et au clergé pour plus de confiance, d’intégrité et d’indépendance politique ou partisane.
  • Vous encourage à engager des discussions de haut niveau avec l’opposition avec la participation de l’UA comme intermédiaire ou médiateur pour la bonne gestion du pouvoir d’état, la réconciliation, la révision des textes et composition de la CEI, les conditions d’éligibilité, un contrat politique entre partis en cas de victoire ou défaite d’un groupe politique et la supervision des élections de 2015 par des émissaires de l’UA.
  • Vous interpelle à restaurer dans les plus brefs délais l’état de droit et la démocratie.
  • Vous interpelle à réhabiliter les forces régaliennes telles la Police et la Gendarmerie.
  • Vous interpelle à mettre sur pied un nouveau programme DDR, à démobiliser les supplétifs Dozo et les renvoyer dans leur zone géographique, à cantonner ou à encaserner les FRCI occupant illégalement les villes, villages et hameaux et finalement à proposer aux députés un projet de loi sur la refonte de l’armée, une véritable armée républicaine selon l’esprit et la lettre de l’Accord Politique de Ouagadougou.
  • Vous interpelle à faire des droits de l’homme la prunelle de vos yeux.
  • Vous conseille de démissionner en tant que Président de votre parti en conformité avec l’article 54 de la constitution de juillet 2000 et attendre que le congrès du RDR vous confirme comme le candidat du parti aux élections de 2015.
  • Veillera à résoudre par la négociation, dialogue, explications et dénonciation les crises et conflits nés du déficit démocratique en Côte D’Ivoire.

  • Réitère son attachement au processus de démocratisation et à la résolution des crises en Afrique et en Côte D’Ivoire en particulier.

  • Rappelle à tous qu’il est une cellule intellectuelle, scientifique et politique créée le 22 mars 2013 à Londres, Royaume Uni.

Fait à Londres le 07 Août 2013.

Nick De Bessou

Juriste et Anthropologue Politique.

Président du FDRC.

Forum pour la Démocratie et la Résolution des Crises (FDRC).

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